Edito Journal des Employés et Cadres FO n°43 – avril 2012

Publié le par FO Pages Jaunes

DE LA SOUFFRANCE AU TRAVAIL AU SUICIDE
Ces dernières semaines ont, une fois de plus, été les témoins de plusieurs suicides intervenus sur le lieu de travail ou mettant en cause directement le milieu de travail des victimes.
Faisons un retour en arrière de quelques années. En 2007, ce sujet a émergé de façon importante dans les médias à l’occasion de plusieurs cas de suicides de salariés du technocentre de Renault.
Puis ce fut à France Télécom où ce fléau a frappé à grande échelle.
Il faut bien constater que dans ces deux cas, ce sont les organisations syndicales qui ont porté ces faits en dehors de l’enceinte de l’entreprise et qui ont ainsi permis une prise de conscience de notre société grâce à la médiatisation.
Elles ont aussi briser la chape de plomb imposée par les directions des entreprises pour faire analyser l’organisation du travail et les procédures de management par des organismes spécialisés extérieurs à l’entreprise.
Dans ces deux faits "emblématiques", la responsabilité de la direction de l’entreprise a été sans équivoque.
Pire, cela a permis de montrer que leur inhumanité allait de pair avec leur cupidité. L’être humain n’est rien s’il est un frein à la réalisation d’objectifs. Ces mêmes objectifs étant inatteignables sans mise en cause de l’intégrité des individus.
Nous sommes en 2012. Tout cela est connu, reconnu et su par tous les acteurs mais rien n’a changé.
La seule réponse ou quasi seule réponse des directions d’entreprise consiste à s’enfermer dans le déni en rejetant le passage à l’acte sur d’autres raisons purement personnelles, ou pour celles qui sont plus agressives à accuser les représentants du personnel de récupération lorque ceux-ci ne font que remplir leur mandat, afin d’éviter d’autres passages à l’acte.
Dans tous les cas, cela s’accompagne de création de commissions sur les risques psychosociaux destinées à "noyer le poisson", certaines entreprises s’en tenant à la mise à disposition d’un numéro d’appel téléphonique pour y expliquer ses problèmes à l’instar de SOS Amitié !
Mais n’est-ce pas là le positionnement logique de tout entreprise dite "moderne" au management tout aussi moderne ?
Notre plus grand ennemi en matière de reconnaissance du fléau et des solutions à y apporter ne se nomme-t-il pas banalisation ?
En effet, le nombre de cas de suicides en raison du travail est devenu si important que cela se fond dans le paysage quotidien.
Plus un média pour être choqué par ce phénomène. Tout au plus un entrefilet par ci, par là, quand un cas se présente.
Oui, il est nécessaire de marteler que mourir en raison du travail n’est pas une fatalité et surtout pas un risque normal.Oui, les directions d’entreprises sont "responsables pénalement de la santé psychique et physique de leurs salariés".
Oui, les militants syndicaux ne font que leur travail dans les entreprises pour éviter d’autres cas et ont parfaitement conscience de la douleur des familles et des collègues.
Oui, tout doit être fait pour démonter les procédures de management meutrières et poser les responsabilités pénales individuelles des responsables. Mais, attention au risque de défaussement vers un encadrement qui n’est pas responsable mais aussi victime.
Les CHSCT ont toute latitude pour en faire un axe majeur de leur action, et ils bénéficient des dispositions légales et des recours le permettant.
Pour autant, une prise conscience générale est indispensable pour faire sortir de l’oubli le phénomène global des suicides dans notre pays.
C’est le sens de l’appel des 44 en faveur de la création d’un observatoire des suicides ; appel repris ci-après et dont une publicité large doit être donnée pour en maximiser la signature.
Ce sera un outil de plus pour notre efficacité dans les entreprises.
Souffrir au travail n’est pas inéluctable et en mourir n’est pas une fatalité.
Serge LEGAGNOA Secrétaire général

Publié dans L' Edito des salariés

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